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Addictions

Sommaire

Introduction et épidémiologie

Complications gynéco-obstétriques liées aux différentes consommations psychoactives et risques pour l’enfant à naître

Repérer les usages

Traitement

Rôles du médecin généraliste

Documents et ressources pour le praticien et sa patiente

Toxicomanie et post-partum

Le tabac et l’alcool durant la grossesse sont traitées dans des pages dédiés :
Pour en savoir plus : Tabac et grossesse ou Alcool et grossesse.

La HAS conseille que le suivi de grossesse d’une patiente faisant l’usage de drogues illicites doit faire appel à un avis auprès d’un gynécologue-obstétricien et/ ou d’un autre spécialiste.
Car il est considéré comme grossesse à risque. Néanmoins le médecin traitant de la patiente tient un rôle de soutien majeur.

Introduction et épidémiologie

En France, 25 à 30% des personnes toxicomanes sont des femmes.
Il est nécessaire de dépister fréquemment les co-infections potentielles chez ces patientes.
Le nombre de femmes enceintes toxicomanes n’est pas connu avec précision.

De plus, le diagnostic de grossesse n’est pas forcément évident chez ces femmes du fait de perturbations du cycle menstruel avec aménorrhée fréquente (presque la moitié).

Complications gynéco-obstétriques liées aux différentes consommations psychoactives et risques pour l’enfant à naître

Il est nécessaire de connaître les principaux effets des toxiques utilisés pendant la grossesse et leurs effets à la naissance pour informer la patiente des dangers de cet usage. Elles sont classées par ordre de fréquence de consommation.

Les menaces d’accouchement prématuré (MAP) surviennent dans 20 % des cas par irritabilité du muscle utérin, favorisée par la prise irrégulière de toxiques.

Cannabis :

Le cannabis est la substance illicite la plus fréquemment consommée.
Le principal agent psychoactif est le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC) qui provoque un effet relaxant, apaisant voire euphorisant.
Le cannabis passe la barrière hémato placentaire et se fixe dans le tissu cérébral car il est lipophile.

Conséquences maternelles :

    • Anomalies de placentation : Augmente le taux de fausses couches spontanées et d’HRP.
    • Complications cardio pulmonaires.
    • Fausse couche.
    • MAP (20%).
    • Accouchement prématuré.
    • Troubles psychologiques ou psychiatriques : état anxio dépressif.
    • Risques de Malnutrition et de précarité.

Conséquences fœtales et sur l’enfant : 
Il existe un effet dose dépendant : La consommation occasionnelle est moins à risque pour le pronostic néonatal que la consommation régulière et importante (≥ 6fois/semaine).

    • Pas tératogène.
    • Prématurité.
    • RCIU (par hypoperfusion palcentaire) et Hypotrophie.
    • Syndrome de sevrage néonatal aspécifique : trémulations, sursauts, troubles du sommeil.
    • Mort inattendue du nourrisson.
    • TDAH : Déficits de l’attention, troubles des apprentissages, hyperactivité.
    • Perturbation de certains tests cognitifs, Syndromes « Dys ».
    • Pas d’anomalies de QI.
    • Syndrome anxio dépressif à l’adolescence.

Opiacés :

Regroupe : L’héroïne, la méthadone, la dihydrocodéine, la buprénorphine, et les antalgiques dérivés de la morphine.
Ce groupe représente ¼ à 1/3 des consommateurs.
Ils franchissement facilement la barrière hémato-placentaire.

Concernant l’héroïne, elle peut être sniffée, fumée ou injectée.
C’est un dépresseur du SNC, qui entraine euphorie, puis apaisement et détente.
Elle est à très haut risque de dépendance.
Ses signes de manque sont : Rhinorrhée, larmoiement, sueurs, bâillements, puis douleurs et crampes abdominales.

Conséquences maternelles :

    • Troubles du cycles fréquents : Diagnostic de grossesse tardif.
    • Fausses couches spontanées (15 à 30%).
    • Accouchement prématuré.
    • Troubles psychologiques ou psychiatriques : Etat anxio dépressif, comportement addictif, syndrome de sevrage (si la patiente l’expérimente, son fœtus aussi).

Conséquences fœtales et sur l’enfant : 
Les opiacés ne sont pas tératogènes.

    • RCIU et hypotrophie à la naissance.
    • Prématurité.
    • MFIU.
    • Risques liés aux produits de coupes et aux modes d’usage : Infections VIH, hépatites, bactériémies.
    • Syndrome de sevrage fœtal : Le risque pour lui est le manque, il est fragilisé par les phases d’alternance entre prise du produit et sevrage.
    • Syndrome de sevrage néonatal (rarement immédiat plutôt dans les 24 à 72h après la naissance, dure environ 10 jours).
    • Mort inattendue du nourrisson.

A noter : Tous les traitements de substitutions peuvent induire un syndrome de sevrage.

Cocaïne :

0,5 à 3% des femmes consomment de la cocaïne durant leur grossesse, mais cette consommation diminue à mesure que la naissance approche.
La cocaïne ou chlorhydrate de cocaïne est une substance psychoactive puissante obtenue par transformation de la feuille de coca. Elle peut être consommée en IV, en sniff ou fumée (crack).

La cocaïne franchit la barrière hémato-placentaire.
Son risque tient surtout du fait de son puissant effet vasoconstricteur car elle est créé des vasoconstrictions utérines.

Conséquences maternelles :

    • Fausses couches augmentées (RR : 10) par décollement placentaire.
    • Syndrome d’hypoperfusion placentaire provoquant pré-éclampsie, HRP (RR : 5).
    • Accouchement prématuré
    • Risque de rupture utérine par majoration des contractions utérines.
    • Risque accru d’hydramnios, de rupture prématurée des membranes (RR : 4).
    • Poussées hypertensives et tachycardie.
    • Infarctus du myocarde.
    • Troubles psychologiques ou psychiatriques : Syndrome anxio dépressif, comportement addictif, troubles paranoïdes
    • Ulcérations voire perforation de la cloison nasale lorsque le produit est sniffé.
    • Risques associés aux poly-consommations et au mode de consommation : Risques d’infection virale hépatites B et C ou infection à VIH si elle est injectée.
    • Risques de malnutrition et de précarité.

Conséquences fœtales et sur l’enfant : 

    • RCIU.
    • Prématurité.
    • Faible poids de naissance / hypotrophie.
    • Risques liés aux produits de coupes et aux modes de consommation : Infections VIH, hépatites, bactériémies.
    • Neurotoxicité, diminution du volume cérébral, lésions hémorragiques cérébrales.
    • Affections gastro-intestinales : Entérocolites ulcéronécrosantes, infarctus mésentériques.
    • Anomalies de la migration.
    • Syndrome de sevrage néonatal : Irritabilité, tremblements, cris aigus, hyperexcitabilité réflexes vifs, convulsions possibles puis léthargie hypotonique.
    • Troubles de apprentissages et syndromes « Dys ».

Il existe peu de littérature pour les toxiques suivants, les risques de leur usage sont peu connus durant la grossesse :

Amphétamines :

Elles provoquent une vasoconstriction avec des répercussions sur la vascularisation placentaire et donc sur la croissance fœtale.
Le syndrome de sevrage chez le nouveau-né est exceptionnel.

Les risques fœtaux sont :

    • RCIU.
    • Hypotrophie néonatale.
    • MFIU.
    • Effets neurocomportementaux chez les nouveau-nés : Diminution de l’éveil, dyspraxie, léthargie et stress augmentés.

Ectasy (« E » ou MDMA) :

Il existe peu de données sur les conséquences sur l’issue de la grossesse et la tératogénicité du produit.
Aucun syndrome de sevrage chez le nouveau-né n’a été rapporté.

LSD et les autres hallucinogènes :

Il existe peu de données sur les conséquences sur l’issue de la grossesse et la tératogénicité du produit.
Pour le moment, aucune preuve de tératogénicité n’a été mise en évidence.

Benzodiazépines :

Risques fœtaux :

    • Hypotrophie néonatale.
    • Accouchement prématuré.
    • Amyotrophie spinale si consommation proche du terme de l’accouchement.
    • Syndrome de sevrage néonatal si dépendance aux benzodiazépines.

Tableau récapitulatif des conséquences majeures des toxiques pendant la grossesse :

D’après Henri-Jean Philippe, Protocoles en gynécologie obstétrique.

Repérer les usages

Questionnaires :
Grille d’évaluation du DSM-5 : Grille à compléter directement en ligne pour coter le degré d’addiction à une substance.
Questionnaire spécifique du cannabis : CAST.

En cas de doute => dosages urinaires ou sanguins :
A savoir que les traitements substitutifs ou les opiacés antalgiques (tramadol, fentanyl) ne positivent pas le test de recherche d’opiacés. Il faut faire des recherches spécifiques en précisant le nom de la molécule incrimée à rechercher :
– Demander spécifiquement EDDP pour la Méthadone
– Recherche Buprénorphine pour la Buprénorphine / Tramadol pour le tramadol / etc.

Traitement

Cannabis :

Biopsychosocial +++

Prévenir le transfert d’addictions sur le tabac => penser à la substitution nicotinique à forte dose => lien vers Tabac et grossesse.

Traitement symptomatique du syndrome de sevrage : Anxiolytiques, antispasmodiques.
En cas d’agitation : Atarax® 25mg ½ comprimé est plus recommandé qu’une prise de benzodiazépine.

Ne pas passer à côté d’un syndrome dépressif : Au besoin instauration d’un antidépresseur par ISRS.

Cocaïne :

Pas de traitement spécifique si pas de dépendance physique.
Sinon traitement symptomatique N-acétyl cystéine pour le sevrage (1200 à 3600 mg/jour) pendant 3 semaines.

Hospitalisation et médicalisation du sevrage si :

    • Environnement défavorable.
    • Dépendance physique.
    • Anomalies du développement fœtal.

Opiacés :

Contre-indication formelle au sevrage sec chez la femme enceinte car peut engendrer une augmentation des contractions utérines et il augmente le risque de fausse couche à T1 et d’accouchement prématuré à T3.
Hospitalisation en unité kangourou de néonatalogie quand syndrome de sevrage avéré.
Les traitements de substitution aux opiacés (Buprénorphine et la Méthadone) favorisent un meilleur suivi médical et obstétrical et diminuent la morbimortalité maternelle et fœtale.
Y compris pour les dépendances aux antalgiques de pallier 2 ou 3.

Si la patiente ne prend aucun traitement substitutif : proposer Méthadone en 1ère intention.

Si la patiente prend du Subutex® (Buprénorphine) :

    • Pris de manière satisfaisante : Poursuivre ce traitement.
    • Mésusage (injection) / dose fluctuante / médecin aléatoire : Indication de Méthadone (la dose varie de 10mg à 180mg avec une moyenne à 55mg).

A noter que : La Méthadone a une plus longue demi-vie, elle est donc associée à plus de symptômes de sevrage.
Et La Suboxone® doit être dans la mesure du possible remplacée par le Subutex®.

Si un anxiolytique doit être prescrit à tout prix, il faut privilégier l’Oxazépam (Séresta®) d’après le CNGOF, du fait de sa demi-vie intermédiaire.

Rôles du médecin généraliste

Repérer les consommations.
Prévenir les poly-consommations : Aux benzodiazépines, à l’alcool, au tabac.
Prévenir les risques de carences chez ces femmes : Anémie, malnutrition.
Aider au suivi régulier et au soutien des patientes toxicomanes.

D’après Alain Morel, psychiatre, à la question courante « j’ai pris de XXX avant d’apprendre que j’étais enceinte, est-ce que cela peut nuire à mon bébé ? », la réponse est souvent « non ». Mais les conséquences doivent être évaluées en fonction du type de substance, de la quantité, de la période gestationnelle, de la méthode de prise, et de l’environnement psycho-social de la grossesse.

« Il ne faut pas être culpabilisateur car trop mettre l’accent sur les effets néfastes peut conduire certaines femmes à mettre un terme à leur grossesse de façon inappropriée, à faire un sevrage immédiat ou à éviter le contact avec certains professionnels de santé ».
Les femmes enceintes ayant des conduites addictives doivent être prises en charge dans un réseau coordonné autour du médecin traitant avec :

    • L’obstétricien et une sage-femme qui suivent la patiente.
    • Un(e) pédiatre.
    • Un(e) psychiatre ou une psychologue.
    • Un(e) addictologue.
    • Un membre du réseau de PMI.
    • L’assitant(e) social(e).

NB : Les équipes ELSA existant dans les centres hospitaliers, sont des équipes de liaison d’addictologie, comprenant également des sages-femmes dans leurs équipes.

Documents et ressources pour le praticien et sa patiente

Numéro Drogues info service : 0 800 23 13 13

Disponible 7j/7 de 8h à 2h.
Appel anonyme et gratuit.

Le CRAT et les CRPV :

Ils apportent des informations précieuses au médecin concernant l’évaluation des risques vis-à-vis d’une substance prise durant la grossesse.

Toxicomanie et post-partum

L’objectif du praticien est de veiller aux conditions de bonne santé et sécurité du couple mère et nouveau-né et de favoriser ce lien mère-enfant.
En effet, la séparation voire le placement doivent rester des solutions de dernier recours.

Allaitement :

Les bénéfices apportés par l’allaitement au sein, demeurent supérieurs, même en cas de consommation de drogues. De plus, il participe à la diminution du syndrome de sevrage chez le nouveau-né.
Les mères allaitantes doivent tout de même être informées que tous les toxiques passent dans le lait maternel et sont susceptibles d’être métabolisés par le nouveau-né, et d’entrainer des modifications de comportement.
Les traitements de substitution aux opiacés sont présents en très faible quantité (1 %) dans le lait maternel et sont compatibles avec l’allaitement maternel.

Cannabis : Fortement liposoluble, le THC franchit la barrière placentaire en quelques minutes et se concentre dans le lait maternel où il est présent à un ratio lait/plasma : 8/1.
La contre-indication stricte à l’allaitement est donc discutée, la mère doit être informée de cette concentration importante et il est nécessaire de l’aider à réduire sa consommation.

Cocaïne et Héroïne : En cas de consommation active, l’allaitement est contre-indiqué.

Mis à jour le 10 février 2022.

SOURCES :

Cohen-Salmon Julie, Marty François, Missonnier Sylvain, « Addiction et grossesse : du déplacement de l’objet d’addiction vers le nouveau-né », La psychiatrie de l’enfant, 2011/2 (Vol. 54), p. 433-468. DOI : 10.3917/psye.542.0433. URL : https://www.cairn.info/revue-la-psychiatrie-de-l-enfant-2011-2-page-433.htm

Bonnet Nicolas, Couteron Jean-Pierre, « 28. Grossesses et addictions », dans : Alain Morel éd., Addictologie. En 49 notions. Paris, Dunod, « Aide-Mémoire », 2015, p. 302-324. DOI : 10.3917/dunod.morel.2015.01.0302. URL : https://www-cairn-info.ezpum.biu-montpellier.fr/addictologie–9782100721429-page-302.htm

Kanit M, Sana M, Bani T, Laqueille X. Cannabis et grossesse : actualités et expériences cliniques. Annales Médico-psychologiques, revue psychiatrique. 2009;167(7):53940.

Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF). Prévention des risques fœtaux : infections, médicaments, toxiques irradiations. Addictologie et grossesse. Item 26. Elsevier Masson 4e édition. 2018. Pages 393 à 406.

Addictions et grossesse. DIU formation complémentaire en gynécologie obstétrique pour le médecin généraliste. CHU Nimes. Juin 2020.

A. Morel, J.P. Couteron, Patrick Fouilland. Aide-mémoire Addictologie. 2e édition aux édition Dunod. 2015. Page 308.

Henri-Jean Philippe. Protocoles en gynécologie obstétrique. Chapitre Rubéole et grossesse. 4e édition. 2018. Pages 214 à 216.

Lejeune C, Simonpoli A-M, Gressens P. Conséquences obstétricales et pédiatriques de la consommation de cocaïne pendant la grossesse. Archives de Pédiatrie. 2009;16:S5663.

Simmat-Durand Laurence, « Grossesses sous buprénorphine haut dosage. Commentaire », Sciences sociales et santé, 2006/4 (Vol. 24), p. 45-51. DOI : 10.3917/sss.244.0045. URL : https://www-cairn-info.ezpum.biu-montpellier.fr/revue-sciences-sociales-et-sante-2006-4-page-45.htm

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