Hyperglycémie et diabète
Sommaire
Deux entités à distinguer
Examens complémentaires
Complications
Traitement
Pour l’accouchement
Le post-partum
Deux entités à distinguer
- Le diabète gestationnel : est défini par l’OMS comme un trouble de la tolérance glucidique conduisant à une hyperglycémie de sévérité variable, débutante ou diagnostiquée pour la première fois pendant la grossesse, quels que soient le traitement nécessaire et l’évolution dans le post-partum.
- Un diabète préexistant à la grossesse (type 1 ou 2), persistant dans le post-partum.
Le diabète gestationnel touchait 8% des femmes enceintes en 2010, aujourd’hui ce taux ne cesse d’augmenter puisqu’il est plus proche des 15%.
Ce taux est plus élevé chez certaines populations ethniques : amérindiennes, asiatiques, etc.
La grossesse est une période d’insulinorésistance favorisée par les hormones placentaires : hormone lactogène placentaire, progestérone et les hormones maternelles de contre-régulation glycémique (cortisol, leptine, hormone de croissance). On observe une diminution de la tolérance au glucose au cours de la grossesse normale.
Le diabète gestationnel correspond à la période d’insulino-résistance maximale chez la femme enceinte, il apparaît classiquement au cours du 2nd trimestre et n’entraîne donc pas de risque de malformations fœtales (car la glycémie était normale au moment de l’organogenèse). Il est dû à une adaptation insuffisante du pancréas qui n’augmente pas suffisamment la sécrétion d’insuline pour pallier à l’insulino-résistance d’où l’apparition d’une hyperglycémie.
Examens complémentaires
Quand le dépister ? Un dépistage du diabète peut être proposé :
En pré-conceptionnel afin de dépister un éventuel diabète méconnu avec une glycémie à jeun.
- Diabète gestationnel si la GAJ ≥ 0.92g/l.
- Diabète préexistant si la GAJ ≥ 1,26g/l.
Important : même si la glycémie à jeun est négative au 1er trimestre, l’HGPO sera quand même réalisée entre 24 et 28SA en cas de facteurs de risque.
Tout au long de la grossesse, avec la recherche de glycosurie lors du suivi mensuel (en cas de valeurs limites, elle nécessite une confirmation biologique sanguine car le taux de réabsorption du glucose dans les urines peut être modifié avec la grossesse sans diabète ou pathologie rénale).
- Surpoids ou obésité maternelle : IMC (Indice de masse corporelle) : > 25 kg/m2 avant la grossesse.
- Antécédents familiaux de diabète chez les parents de 1er degré (parents, fratrie).
- Âge supérieur > 35 ans.
- Antécédent personnel d’accouchement d’un enfant macrosome (bébé de plus de 4 kg à terme ou avec un poids de naissance supérieur au 90e percentile pour l’âge gestationnel).
- Antécédent personnel de diabète gestationnel lors d’une grossesse précédente.
Une valeur pathologique suffit à diagnostiquer un diabète gestationnel :
Valeurs seuils de l’HGPO – Issu du site Ameli.fr
- Biométries > 97e percentile ;
- Hydramnios.
Complications
Morbidité néonatale :
- Macrosomie fœtale : pour entrainer une dystocie des épaules et une paralysie du plexus brachial.
- Complications métaboliques : Ictère, polyglobulie, hypoglycémies néonatales dans les quelques heures qui suivent la naissance (Cette complication survient surtout lorsque le diabète est déséquilibré en fin de grossesse). A savoir que le glucose, les corps cétoniques, les acides gras libres et les acides aminés passent la barrière hémato-placentaire, contrairement à l’insuline.
- Détresse respiratoire.
- Liquide amniotique en excès.
- Cardiopathie hypertrophique.
Morbidité maternelle :
Le diabète gestationnel augmente le risque de : césarienne, hypertension artérielle gravidique, et de prééclampsie. Ces complications sont corrélées de façon positive et linéaire au degré de l’hyperglycémie initiale.
Le diabète gestationnel expose à un risque métabolique ultérieur avec un risque élevé de :
- Diabète de type 2 (RR = 7), le risque est d’autant plus grand en cas d’obésité surrajoutée, de diabète gestationnel précoce ou insuliné.
- Syndrome métabolique (RR = 2 à 5).
- Maladies cardiovasculaires (RR = 2).
- Récidive du diabète gestationnel dans 30 à 84% des cas en cas de grossesse ultérieure.
Traitement
Un plan d’alimentation personnalisé sera élaboré pour contrôler la glycémie.
Cela commencera par une prise en charge diététique avec une ration calorique calculée à 25-35 Kcal/kg/jour (sans passer sous la barre des 1600 kcal/jour pour les patientes en obésité). >
Généralement, une alimentation saine avec répartition des féculents sur les 3 repas ainsi qu’une bonne hygiène de vie (gestion du stress, sommeil adéquat et une activité physique d’au moins 30min 3 à 5 fois par semaine) sont suffisantes pour contrôler le diabète gestationnel.
On conseillera à la patiente d’éviter les sucres rapides.
- Glycémie à jeun <0,90 g/l.
- Glycémie 2 heures post repas <1,20 g/l.
Avec une surveillance par auto-contrôle glycémique recommandée 4 à 6 fois/j, à jeun et 2h après chaque repas.
Si les objectifs glycémiques ne sont pas atteints, un rendez-vous auprès d’un diabétologue s’impose pour mise en place d’une insulinothérapie.
(Les ADO n’ont pas l’AMM dans la grossesse).
Pour l’accouchement
- Si le diabète gestationnel est non compliqué :
Possibilité d’accoucher dans une maternité́ de niveau I.
Pas de déclenchement systématique à envisager.
Nécessite la disponibilité́ d’un médecin senior (du fait du risque de dystocie des épaules). - Si le diabète gestationnel est insuliné et non compliqué :
Possibilité́ d’accoucher dans une maternité́ de niveau I.
Pas de déclenchement systématique à envisager.
Nécessite la disponibilité́ du médecin senior (risque dystocie des épaules).
et un suivi de la glycémie : si >1,45g/l insulinothérapie pendant travail et arrêt après accouchement. - Si le diabète gestationnel est compliqué : macrosomie / HTA / RCIU / ATCD de MFIU / déséquilibre glycémique.
Nécessite d’accoucher dans une maternité́ de niveau II ou III.
Et une concertation pluridisciplinaire (gynécologue-obstétricien, pédiatre et diabétologue) pour date et modalités de naissance (entre 37-38 SA).
Suivi glycémie jusqu’à l’accouchement : si >1,45g/l insulinothérapie pendant travail et arrêt après accouchement. - Indication césarienne avant travail : Dépend du contexte obstétrical (bassin, parité, ATCD, etc.)
Le post-partum
Elle doit être adaptée au risque métabolique et vasculaire.
Le diabète gestationnel n’est pas une contre-indication en soi à un traitement oestroprogestatif, si le contrôle glycémique est négatif à 3 mois (pour éliminer un diabète de type 2 installé).
Dans le cas d’un diabète de type 1 ou 2, les oestroprogestatifs et les progestatifs injectables sont contre-indiqués.
L’allaitement maternel est vivement conseillé. Il est possible en cas de diabète de type 1 ou 2 (sauf si traitement par sulfamides Glibenclamide ou Gliclazide, se référer au site du CRAT).
On préviendra les autres facteurs de risque cardiovasculaires (dyslipidémie, tabagisme, surpoids ou obésité et hypertension artérielle) grâce à un arrêt du tabac, une alimentation variée et équilibrée, et une activité physique régulière.
Toute femme ayant un antécédent médical de diabète doit bénéficier d’une consultation préconceptionnelle afin d’anticiper les risques pour les futures grossesses.
Dans le post-partum en cas de diabète gestationnel pendant la grossesse :
Le diabète gestationnel multiplie par 7 le risque de développer un DT2 à moyen ou long terme. Dans 15% des cas, un diabète gestationnel est en fait un diabète de type 2 méconnu. Il est donc important de le dépister précocement : Une HGPO avec 75g de glucose à 3 mois du post-partum est recommandée en cas de diabète gestationnel.
A défaut, une glycémie à jeun est préconisée, elle sera répétée tous les 1 à 3 ans en fonction des facteurs de risque :
- Si glycémie entre 0,95 et 1,25g/L = état de pré-diabète.
- Si glycémie ≥ 1,26 g/L = diabète de type 2.
A distance de l’accouchement (2 à 3 mois) il est recommandé par l’OMS de réaliser une nouvelle HGPO de dépistage 75 g sur 2 heures :
Glycémie à T0 :
- Valeur à jeun normale < 1,10 g/l.
- ≥ 1,26 g/l = diabète.
- Entre 1,10 et 1,26 g/l = glycémie à jeun anormale.
Glycémie à 2h :
- Valeur normale < 1,40 g/l.
- ≥ 2,00 g/l = diabète.
- Entre 1,40 et 2,00 g/l = anomalie de la tolérance glucidique « pré diabète ».
Ainsi qu’une glycémie à jeun tous les 1 à 3 ans.
Les femmes enceintes diabétiques de type 1 et 2 doivent être suivies de manière conjointe par un diabétologue et leur gynécologue-obstétricien. Leur suivi de grossesse ne relève pas de la médecine générale.
En pré-conceptionnel, leur diabète doit être équilibré au mieux, en amont qu’elles ne tombent enceintes, afin d’éviter de très nombreuses complications, en particulier celui des malformations congénitales induites par l’hyperglycémie lors de l’organogénèse.
Mis à jour le 19 janvier 2022.
Feig D, Berger H, Donovan L et al. Diabetes Canada 2018 Clinical Practice Guidelines for the Prevention and Management of Diabetes in Canada : Diabetes and Pregnancy. Can J Diabetes 2018; 42 (Suppl 1): S255-S282.
Société francçaise d’endocrinologie. Principales complications de la grossesse – Diabète gestationnel. Disponible sur: http://www.sfendocrino.org/article/380/item-17-ndash-principales-complications-de-la-grossesse-diabete-gestationnel
Dr Guedj. Pathologies endocriniennes et grossesse. CHU Nimes. DIU « Formation complémentaire en gynécologie obstétrique pour le médecin généraliste ». CHU Nimes. Avril 2020. 99 pages.
Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF), Nutrition et grossesse : Item 252. Elsevier Masson ; 4e édition 2018. Chapitre 34. Pages 535 à 542.